2e cycle des Vendredis du music-hall, organisé par Camille Paillet
Animé par une perspective épistémologique, le séminaire « Les Vendredis du music-hall. Héritiers, héritages du music-hall (XVIIIe – XXe siècles) » propose d’ouvrir un chantier de recherche sur le music-hall, en explorant les racines historiographiques de ce divertissement, dans le contexte euro-américain, et sur une large période comprise entre les prémices des cafés-spectacles au XVIIIe siècle jusqu’au music-hall du XXe siècle. Articulé autour de trois principales acceptions du music-hall (en tant que lieu, spectacle, objet patrimonial) et trois enjeux méthodologiques (documenter, identifier, contextualiser) , cette manifestation scientifique souhaite impulser une recherche collective et fédérer un premier groupe de chercheurs et chercheuses spécialisé.es ou en voie de spécialisation sur ce domaine d’étude.
Le music-hall pourra être appréhendé, conjointement ou séparément, en tant que lieu de divertissement, comme objet spectaculaire ou vecteur de patrimonialisation culturelle.
• À mi-chemin entre un café, un jardin d’agrément, un bal et une
scène théâtrale, cette session aborde la question de la parenté du
music-hall avec ces divertissements connexes.
Les interventions se pencheront sur l’héritage de ces formes de loisir
en questionnant l’histoire de la morphologie des salles et leurs
implantations géographiques au sein du paysage théâtral depuis le
XVIIIe siècle.
Elles pourront également interroger l’environnement social du music-hall
en étudiant l’évolution sociologique des publics, les pratiques de
sociabilité qui s’y déploient ainsi que la présence d’activités
parallèles à l’expérience spectaculaire.
• Un second axe thématique est dédié à l’étude des répertoires du music-hall, marqué par la variété des écritures spectaculaires et la mixité des disciplines artistiques représentées. Nous privilégierons une approche générique qui consistera, dans un premier temps, à inventorier les genres, sous-genres et styles spectaculaires, que ceux-ci soient issus de l’histoire canonique des arts scéniques (opérette, vaudeville, ballet), de l’histoire des attractions foraines (prestidigitation, numéros acrobatiques) ou l’objet de formulation plus difficilement saisissable ou à l’existence plus éphémère (revue-bouffe, pantomime-féerie).
• Un troisième volet s’intéresse aux dynamiques patrimoniales du music-hall en étudiant la position qu’il occupe dans l’historiographie des arts spectaculaires et dans la transmission des savoirs. Envisagé comme lieu de fabrique patrimonial, nous chercherons à évaluer l’impact de ce divertissement dans la diffusion des pratiques spectaculaires et dans l’édification des capitales culturelles aux XIXe et XXe siècles.
Le séminaire se veut être un espace de travail collaboratif autour de trois principaux enjeux méthodologiques : documenter, identifier, contextualiser.
Le premier s’intéresse aux traces mémorielles du music-hall en explorant la diversité des matériaux existants visant à alimenter les savoirs sur une œuvre, un genre spectaculaire, le parcours d’un artiste ou d’autres aspects fondamentaux de l’histoire esthétique et culturelle de ces lieux de divertissement.
La seconde perspective tend à marquer un territoire de recherche, à dessiner les contours de cet objet d’étude. La démarche vise à enquêter sur la généalogie de quelques pratiques, représentations et discours associés au music-hall, depuis les processus de création, de réception et/ou de média(tisa)tion.
Enfin, nous porterons une attention aux rapports entre historicités et définitions en étudiant l’évolution de cette industrie culturelle dans une dynamique diachronique. L’étude de différents contextes historiques vise à rendre compte de chronologies différenciées tout en multipliant les échelles de gradualité afin d’engager une approche à la fois locale et globale de l’histoire de ce divertissement.
Séances
Vendredi 2 décembre 2022
Recherches doctorales et postdoctorales sur le music-hall
9h30-18h30
Amphithéâtre
>> télécharger le programme du 2 décembre 2022 (pdf)
Vendredi 3 février 2023
Du local à l’international
14h-17h
Salle panoramique
>> télécharger le programme du 3 février 2023 (pdf)
Vendredi 7 avril 2023
Le music-hall à l’écran
14h-17h
Salle panoramique
Vendredi 2 juin 2023
Artistes de music-hall aujourd’hui
9h30-18h30
Salle 413 ou dans un lieu de spectacle extérieur (à confirmer)
programme détaillé du vendredi 3 février 2023
- Cyril Triolaire, université Clermont Auvergne Le “music-hall” au café et au théâtre dans le Massif central au 19e siècle
Les spectacles de curiosités se muent en spectacles à succès des fêtes foraines, des cafés et des théâtres au cours de la seconde moitié du 19e siècle. Au cœur d’un massif central largement rural mais dont les structures de production et de diffusion des spectacles se modernisent dans le dernier tiers du siècle, le music-hall se développe-t-il à l’instar des très grandes villes de province et de Paris ? Des établissements dédiés à ce phénomène culturel et artistique ouvrent-ils leurs portes et les programmations proposées se conforment-elles au schéma performatif et divertissant caractéristique des établissements qui en font la renommée dans la capitale ?
- John Mullen, université de Rouen Normandie
Le Music-hall au Royaume-Uni 1880-1925
Dans un pays très urbanisé, si le répertoire folk des campagnes est régulièrement ressuscité par des enthousiastes issus de la classe moyenne, et la comédie musicale plaît aux couches un peu plus aisées, le music-hall est le divertissement des ouvriers. Le répertoire chanté, qui n’est plus grivois mais reste peu romantique, se doit de servir une bonhomie bruyante. J’explorerai comment les conditions sociales, juridiques, idéologiques, politiques et industrielles de l’époque du music-hall tardif ont produit un répertoire fascinant.
programme détaillé du vendredi 2 décembre 2022
Recherches doctorales et postdoctorales sur le music-hall
9h30 Accueil
10h Introduction
10h15-11h15
Delphine Foch (EPHE-PSL)
La rénovation des music-halls parisiens dans les années 1920 : le cas du Moulin Rouge
Depuis son ouverture en 1889, le Moulin Rouge a connu plusieurs reconstructions et quelques réaménagements discrets mais réguliers. Leur étude permet de retrouver la mémoire des lieux et de comprendre l’évolution des pratiques spectaculaires et des usages sociaux-économiques. Parmi ces rénovations, la plus imposante et la plus ambitieuse n’est autre que celle de 1924, qui survint après l’incendie de 1915 et la guerre. Cette « résurrection », très relayée par la presse, ne concerne cependant qu’une partie du Moulin Rouge, comportant en effet plusieurs établissements : un bal en sous-sol, épargné par l’incendie, et le nouveau « théâtre-music-hall », adjoints l’un et l’autre d’activités diverses (restauration et attractions). On tâchera de comprendre l’articulation de ces différents espaces – et leurs activités – mais aussi de comparer ce programme architectural à celui des music-halls parisiens reconstruits dans les années 1920.
11h15-12h15
Marine Costille (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
Les publics du music-hall parisien de l’entre-deux-guerres : sociologie et pratiques des spectateurs
Le music-hall de l’entre-deux-guerres est souvent perçu, dans l’imaginaire collectif, comme un divertissement typiquement parisien, où une foule socialement hétéroclite se mélange le temps d’une soirée. Ses spectateurs sont en réalité extrêmement fragmentés, à la fois entre les différents établissements de la capitale et dans leur placement dans la salle, régi par des logiques de distinction sociale. Il s’agira ainsi de montrer que les publics vivent une expérience différente de la sortie au music-hall, à la fois dans leurs pratiques et dans leur relation aux imaginaires déployés sur scène.
12h15-14h déjeuner
14h-15h
Erwan le Gueut (Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis)
Le tour de chant d’Agnès Capri (1936-1958) : un répertoire inattendu, un genre nouveau
La comédienne Agnès Capri (1907-1976) présente pour la première fois son tour de chant au cabaret le Boeuf-sur-le Toit, le 6 février 1936. Le répertoire choisi, l’expression, la tenue de scène sont complètement inattendus. La jeune chanteuse vient, naïvement, de créer un nouveau genre. Encouragements et contestations sont immédiats. Cette nouvelle voix, accordant une large place à la poésie, au surréalisme et à un nouveau style d’humour noir, vient renforcer un courant rénovateur émergeant alors dans la chanson. Le travail en cours, à partir des archives disponibles, de coupures de presse et de témoignages de l’époque, espère, après reconstitution de son répertoire, redonner à Agnès Capri une place légitime parmi les grands rénovateurs de la chanson que sont Mireille, Jean Nohain, Charles Trenet ou Marianne Oswald.
15h-16h
Fleur Hopkins-Loféron (Thalim-CNRS)
Du Christ romantique au mort-vivant : petit répertoire des fakirs à la française (1920-1940)
À la fin des années 1920, les spectacles de fakirs fleurissent sur la scène des music-hall. Si tous s’allongent sur des planches à clous, se percent les joues à l’aide d’aiguilles, hypnotisent de petits animaux ou se font enterrer vivants, chacun donne une explication singulière aux prodiges, d’ordres rationnelle (professeur Dicksonn), surnaturelle (Blacaman), ou pseudo-scientifique (Tahra-Bey). Cette tension persistante entre science et magie, qui s’explique par le fait que le fakirisme est une appropriation française pétrie d’occultisme, connaîtra son point d’orgue dans l’affrontement de Paul Heuzé, célèbre démystificateur, avec Tahra-Bey.
16h-16h30 pause-café
16h30-17h30
Paul Warnery (Université Paul-Valéry Montpellier 3)
Cirque et music-hall ou l’anthropophagie à l’œuvre
Au-delà des catégories, c’est l’individu qui fait cirque. Pour des raisons économiques, l’artiste se produit au cabaret et au music-hall. L’interdisciplinarité est constitutive de sa personne qui lui permet de se situer entre les formes (cirque, cabaret, music-hall), et d’y transférer les compétences et savoir-faire féconds pour la création. Nous qualifions l’artiste de cirque : « anthropophage » (O. de Andrade, 1928) —, tant il mange l’autre pour toujours devenir autre. À travers le paysage spectaculaire français de l’acrobatie, nous montrerons comment cirque, cabaret et music-hall s’interpénètrent, s’empruntent, s’approprient des entrées toujours plus sensationnelles. En nous appuyant sur notre expérience, nous remettrons en perspective esthétique le rapport symbiotico-économique entre cirque, cabaret et music-hall.
17h30-18h30
Orianne Maubert (Université de Lille)
Corps marionnettique, corps transformé dans le cabaret
D’Alfred Jarry à Johanny Bert en passant par Neville Tranter, les arts de la marionnette puisent dans les ressorts esthétiques et dramaturgiques du cabaret et du music-hall. Il s’agira de s’intéresser ici à la manière dont une gestuelle grotesque dansée – de la marionnette autant que du corps humain à ses côtés – déconstruit sur les scènes tout attendu, tout ordre établi. Dans ce grincement des corps-matières, en dansant, serpentant, le corps marionnettique ravagé bascule vers une dislocation virtuose.
informations pratiques
à la Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord
20 avenue George Sand, 93210 St-Denis la Plaine
- Vendredi 2 décembre 2022, 9h30-18h30
- Vendredi 3 février 2023, 14h-17h
- Vendredi 7 avril 2023, 14h-17h
- Vendredi 2 juin 2023, 9h30-18h30
Le projet de recherche Music-hall a été soutenu par la MSH Paris Nord en 2021 et 2022, dans le cadre de son AAP et a notamment donné lieu à des séminaires.
Projet porté par Camille Paillet, Musidanse, université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis/CHS, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne/CNRS.
https://www.mshparisnord.fr/event/seminaire-les-vendredis-du-music-hall/2021-11-12/